Le foyer est là où se trouve le (télé)travail

14 decembre, 2020 - Au risque de radoter, rappelons que la COVID-19 a profondément modifié notre façon de travailler. Pendant la pandémie, les entreprises non considérées comme fournissant des services essentiels ont dû soit fermer, soit trouver de nouvelles méthodes pour poursuivre leurs activités.

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Bon nombre d’entre elles, l’IPN inclus, ont choisi de rester opérationnelles en ligne, en faisant travailler leur personnel à domicile : selon Statistique Canada, 40 pour cent des employés ont travaillé chez eux à un moment ou à un autre pendant la pandémie. Il s’agit là d’une forte hausse par rapport à 2018, où moins de 10 pour cent des employés travaillaient à domicile un ou deux jours par semaine.

Quand le monde émergera de cette pandémie, le basculement vers le télétravail devrait se poursuivre. Le géant technologique Facebook s’attend ainsi à ce que la moitié de ses effectifs continuent à télétravailler dans la décennie à venir, tandis que Twitter a annoncé à ses employés qu’ils pourraient continuer à travailler à domicile indéfiniment, si tel était leur souhait. À l’étranger, le gouvernement allemand a lancé un projet de loi visant à donner à ses citoyens le droit, légalement, de travailler à domicile s’ils le souhaitent. Plus près de chez nous, Statistique Canada a établi que près d’un quart des entreprises s’attendent à ce que plus de 10 pour cent de leurs effectifs poursuivent le télétravail après la pandémie.

Ne plus avoir besoin de se rendre au bureau pourrait bien être une aubaine pour les régions du centre et de l’ouest de l’Ontario. Une fois libérés de la contrainte de travailler dans les villes du sud, de nombreux employés pourront choisir l’endroit où ils veulent vivre. Les collectivités rurales du Nord ontarien semblent un choix logique pour bon nombre de citadins s’apprêtant à prendre le vert : faible coût de l’immobilier, excellente qualité de vie, communion avec la nature, et bien d’autres avantages caractéristiques du mode de vie des petites villes. En attirant les télétravailleurs, ces collectivités pourraient contribuer à diversifier leurs économies très dépendantes des ressources naturelles, tisser des liens hors de leur région, renforcer les compétences locales et épauler les entreprises de la localité.

En revanche, nous ne devons pas partir du principe que les télétravailleurs emménageront forcément en masse dans le Nord ontarien. Des études préliminaires montrent que certains des employés quittant les grandes villes choisissent de s’établir dans des centres urbains de petite et moyenne taille et dans des collectivités de taille plus modeste situées à une courte distance en voiture de leur ancien domicile, plutôt que de s’installer définitivement dans des collectivités rurales plus éloignées. Par conséquent, nous devons fournir plus d’efforts pour que les régions rurales du Nord ontarien puissent tirer parti de la migration des télétravailleurs. Voici quelques pistes possibles :

Mise à niveau du réseau Internet

Parlons du problème qui saute immédiatement aux yeux : dans le Nord ontarien rural, le service à large bande n’est pas à la hauteur. Ce sujet, l’IPN l’a abordé à maintes et maintes reprises, c’est pourquoi je ne m’y attarderai pas. Le télétravail exige une bonne connexion Internet, et pour attirer les télétravailleurs dans notre région, nous devons nous pencher sérieusement sur la mise à niveau de notre infrastructure Internet et la réduction de la fracture numérique.

Mesures incitatives et promotionnelles

L’un des moyens les plus efficaces pour attirer les télétravailleurs consiste à leur proposer des incitatifs financiers. Le seul fait de déménager peut être onéreux, et il faut débourser environ 2 000 dollars pour un déménagement longue distance. Pour faciliter les choses aux télétravailleurs, la ville de Savannah a ainsi mis en place un incitatif à l’emménagement qui vise à rembourser jusqu’à 2 000 dollars sur les frais occasionnés. D’autres collectivités, comme Smooth Rock Falls, proposent de considérables rabais sur le prix des terrains et/ou d’importants allégements fiscaux.

Autre moyen (peut-être le plus évident) : payer (littéralement) les télétravailleurs pour qu’ils s’installent dans la région. Tulsa, en Oklahoma, a ainsi créé un programme permettant aux télétravailleurs de déposer une demande afin de toucher 10 000 dollars en espèces pour emménager dans la ville. Un premier bilan du programme est encourageant : le comité de sélection a reçu 10 000 demandes et sur les 100 personnes sélectionnées, 70 ont accepté l’offre et emménagé à Tulsa. Seules deux d’entre elles sont reparties peu après; les autres sont demeurées à Tulsa. Shoals (Alabama), ainsi que l’État du Vermont, utilisent eux aussi des incitatifs sous forme d’espèces sonnantes et trébuchantes pour encourager les télétravailleurs à s’établir dans leurs localités. Dans le Nord ontarien, un tel financement pourrait provenir directement des municipalités, ou bien être versé par des organismes tels que la SGFPNO, qui a déclaré que l’un de ses objectifs consistait à développer l’économie numérique de notre région.

En conjuguant ces mesures incitatives à des activités promotionnelles venant souligner les coûts déjà faibles dans nos collectivités, leurs ressources naturelles et communautaires, et notre engagement envers l’ouverture et l’inclusivité, on obtient une offre que les télétravailleurs auront bien du mal à refuser.

Créer des télétravailleurs dans le Nord

Les habitants du Nord de l’Ontario quittent le plus souvent leur région pour améliorer leurs perspectives économiques. L’avènement du télétravail va cependant nous permettre de faire venir les emplois chez nous, et pas l’inverse. En concevant des programmes qui donnent aux résidents du Nord les compétences et habiletés voulues pour postuler à des emplois à distance, nous pouvons leur permettre d’avoir une carrière intéressante tout en restant vivre dans nos collectivités rurales. L’État de l’Utah a établi un programme de ce type, baptisé Rural Online Initiative. Administré sous forme d’une série de modules et d’ateliers interactifs, il vise à conférer aux télétravailleurs des régions rurales éloignées un avantage concurrentiel en les formant à l’utilisation des plateformes en ligne pour les réunions, la gestion de projets et l’éducation, ainsi qu’en les dotant des compétences générales associées au télétravail. Ce type de certification pourrait aider les collectivités du Nord à renforcer la capacité locale, à tirer parti des nouvelles réalités professionnelles et à solidifier leur population.

Établir d’autres espaces de travail

Travailler à distance ne veut pas forcément dire travailler de chez soi. Même s’il est vrai qu’une large partie du télétravail s’effectue à domicile, plus de 50 pour cent des télétravailleurs indiquent que les cafés et les espaces communautaires de travail sont les endroits où ils travaillent le plus fréquemment hors de leur propre domicile. Ces autres espaces de travail offrent aux télétravailleurs un lien social et des occasions de participer au développement communautaire, tout en leur proposant un changement de décor fort nécessaire. La création de pôles d’innovation ou d’espaces communautaires de travail peut être un moyen utile de prouver notre détermination aux télétravailleurs, faciliter leur intégration dans la communauté et stimuler l’innovation et le développement des affaires à l’échelon local.

À l’heure actuelle, les rares espaces communautaires de travail qui existent dans le Nord de l’Ontario se trouvent dans nos cinq plus grandes villes, à l’exception de l’espace Co-Worx, situé à Haileybury. Les villes les plus petites qui ne disposent pas des ressources leur permettant d’édifier de nouveaux espaces pourraient tirer parti de locaux existants. Les bibliothèques, les salles de loisirs et d’autres bâtiments communautaires peuvent être équipés d’un réseau Wi-Fi et accueillir chaque semaine à un horaire déterminé les personnes ayant besoin de lieux communautaires de travail et de réseautage. À tout le moins, les municipalités pourraient aider les cafés et les petits restaurants à se doter d’équipement Wi-Fi de qualité (et éventuellement à proposer des rabais aux télétravailleurs) pour devenir des espaces de travail susceptibles de séduire les employés quand l’envie de changer de décor se fait sentir.

 

Écrivez pour nous 

Mateo Orrantia est un analyste de recherche.


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