État de la santé mentale dans le Nord de l'Ontario et pourquoi

18 août, 2020 - Selon le gouvernement du Canada, la santé mentale est définie comme un état de bien-être psychologique et émotionnel. Une bonne santé mentale est extrêmement importante pour les individus et pour la société. Elle permet de vivre heureux, d'atteindre une productivité maximale et de mieux faire face aux défis de la vie. Une mauvaise santé mentale peut, en revanche, entraîner des maladies mentales et physiques. C'est pourquoi il est essentiel que les communautés mettent en œuvre des services qui favorisent une bonne santé mentale. Dans ce blogue, nous explorerons d'abord l'état de la santé mentale dans le Nord de l'Ontario. Ensuite, des explications potentielles sur l'état de santé mentale du Nord de l'Ontario seront fournies.

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La santé mentale autodéclarée est un bon indicateur de la santé mentale et du bien-être. Comparons donc le pourcentage de personnes qui perçoivent leur santé mentale comme bonne ou excellente pour chacun des sept bureaux de santé du Nord de l'Ontario (figure 1). Tous les bureaux de santé du Nord de l'Ontario – à l'exception du bureau de santé du district de North Bay et de Parry Sound – avaient un pourcentage plus faible de personnes qui considéraient leur santé mentale comme très bonne ou excellente par rapport à l'Ontario pour l'année 2017-2018 (figure 1). 

Figure 1

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Source: Statistique Canada. Tableau 13-10-0113-01. Caractéristiques de la santé, estimations sur deux ans.

Une explication possible de la baisse de la santé mentale perçue dans le Nord de l'Ontario peut être le manque d'accès aux soins. Les services de santé mentale sont moins accessibles dans les régions rurales; bien entendu, le Nord de l'Ontario est en grande partie rural ou éloigné. Une analyse antérieure a démontré que les coûts associés aux déplacements vers les régions urbaines voisines dissuadent les individus de recevoir des services de santé mentale importants.

Lorsque l'on compare les taux de renvoi des Réseaux locaux d'intégration des services de santé (RLISS)[1] pour 100 000 personnes selon des hospitalisations dans la catégorie de la santé mentale et des dépendances, les chiffres sont beaucoup plus élevés pour les RLISS du Nord-Est et du Nord-Ouest (figure 2)2,3. La maladie mentale et la toxicomanie sont des problèmes importants dans le Nord de l'Ontario. Cela contribuerait évidemment à la baisse de l'état de santé mentale perçu, tel qu’indiqué dans la figure 1.

Le manque de services en matière de santé mentale fournis par les équipes de soins de santé primaires, les centres de toxicomanie et de santé mentale, ainsi que d'autres groupes de conseil aggraverait ce problème. En l'absence de services de santé mentale communautaires, les personnes souffrant de troubles mentaux et de toxicomanie doivent se rendre dans les hôpitaux comme point d'accès principal pour recevoir de l'aide. Cela crée un pourcentage plus élevé d'admissions dans les hôpitaux pour les RLISS du Nord, en plus de sous-dénombrer ceux qui ont besoin de services dans les régions rurales et éloignées sans accès à l'hôpital.

Figure 2

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Source: Institut canadien d'information sur la santé. Hospitalisations en santé mentale et en toxicomanie au Canada, par région sociosanitaire.

Une mauvaise santé mentale ne signifie pas nécessairement qu'une personne a une maladie mentale. Les déterminants sociaux de la santé mentale peuvent aider à expliquer les faibles pourcentages d'individus déclarant une très bonne ou une excellente santé mentale dans le Nord de l'Ontario. Les déterminants importants de la santé mentale sont l'inclusion sociale, l'absence de discrimination et de violence et l'accès aux ressources économiques. L'indice de bien-être communautaire est mesuré en combinant des données sur le revenu, l'éducation, le logement et l'activité sur le marché du travail. L'indice moyen du bien-être des collectivités basé sur les données de recensement de 1981 à 2006, ainsi que les donnés de l'Enquête nationale auprès des ménages de 2011 et 2016 était de 69,6 dans le Nord de l'Ontario, comparativement à 74,9 pour l'ensemble de l'Ontario. À ce titre, les niveaux inférieurs de bien-être socioéconomique signalés dans le Nord de l'Ontario peuvent jouer un rôle dans l'autoévaluation de la santé mentale qui se porte moins bien que dans le reste de l'Ontario. D'autre part, il est peu probable que l'inclusion sociale soit un facteur important pour le Nord de l'Ontario puisque tous sauf le Bureau de santé du district de North Bay et de Parry Sound affichaient des taux plus élevés d'auto-déclaration d'un fort sentiment d'appartenance à leur communauté (figure 3).

Figure 3

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Source: Statistique Canada. Tableau 13-10-0113-01. Caractéristiques de la santé, estimations sur deux ans.

Le Nord de l'Ontario a également une démographie très différente de celle du reste de l'Ontario. Selon le recensement de 2016, 2,8% de la population de l'Ontario s'est auto-identifiée comme étant une personne autochtone, tandis que le Nord de l'Ontario avait une proportion beaucoup plus élevée avec 18,4%.[1] Le pourcentage d'autochtones (à l'exclusion des réserves) au Canada âgés de 18 ans et plus ayant déclaré une santé mentale excellente ou très bonne était de 60% pour les Premières Nations, 64% pour les Métis et 53% pour les Inuits. En comparaison, 72% de la population canadienne non-autochtone a déclaré une santé mentale excellente ou très bonne. Il est très probable que le traumatisme intergénérationnel causé par la colonisation et les politiques discriminatoires historiques au Canada, comme les pensionnats indiens et la Loi sur les Indiens, ont créé les conditions qui ont favorisé cette inégalité de santé observée entre les peuples autochtones et non-autochtones.

Les francophones représentent 18,8% de la population du Nord de l'Ontario comparativement à 4,7% de la population de l'Ontario.[2] On ne sait pas si la population francophone du Nord de l'Ontario contribue aux résultats moindres en matière de santé mentale, car les données d'autoévaluation des francophones sur la santé mentale ne sont pas disponibles. Cependant, les francophones d'une communauté où ils sont une minorité linguistique peuvent avoir un accès différent aux ressources de santé et aux services de soutien en santé mentale. À partir des données de l'Enquête sur la santé dans les collectivités canadiennes, 38% des francophones ayant déclaré vivre en situation de minorité linguistique ont divulgué souffrir de maladie mentale, comparativement à 34% au Canada. Il est important de s'assurer que les communautés qui comptent des minorités linguistiques francophones ont accès aux services de santé en français, car la langue influence les perceptions de la santé, les relations avec les professionnels/conseillers de la santé, ainsi que leurs connaissances sur les services de santé et d'autres ressources possibles.

Des solutions potentielles sont tentées dans le Nord de l'Ontario pour améliorer l'accès aux services de santé mentale. La télémédecine est de plus en plus utilisée partout en Ontario, ce qui suggère que cela peut améliorer l'accès aux services psychiatriques. Cependant, les communautés qui n'ont pas accès à Internet ne peuvent pas bénéficier de ce service.  En 2008, 8 des 14 équipes de Santé familiale du Nord de l'Ontario comptaient au moins un professionnel de la santé mentale au sein de leur équipe interdisciplinaire. L'intégration d'un plus grand nombre de professionnels de la santé mentale dans les équipes de santé familiale peut améliorer les soins aux patients et le bien-être dans la communauté. La visite de psychiatres dans le cadre du Programme d'extension en psychiatrie de l'Ontario est une autre façon d'améliorer l'accès aux services de santé mentale dans les régions rurales et éloignées de l'Ontario. Cependant, l'enquête de 2008 auprès des équipes de santé familiale a indiqué que le manque de soins continus et uniformes résultant de la présence de différents psychiatres à chaque visite nuit à la qualité des soins du patient.

Différentes combinaisons de ces solutions devraient être mises en œuvre localement dans les communautés du Nord de l'Ontario de manière personnalisée, compte tenu des besoins et des ressources de la communauté. Un suivi et une évaluation devraient également être effectués pour déterminer si les ajustements ont amélioré la santé mentale et le bien-être de sa population.

 

[1] Calcul de l'auteur: Profil du groupe cible autochtone au-delà de 2020

[2] Calcul de l'auteur: Profil du groupe cible francophone au-delà de 2020

[1] Standardisé pour ans

2 Les réseaux locaux d'intégration des services de santé sont des organismes sans but lucratif financés par le ministère de la Santé et des Soins de longue durée pour planifier, financer et intégrer les services de santé pour leurs communautés locales.

3 Le taux de sortie en santé mentale et en toxicomanie est défini comme le nombre de patients dont le diagnostic principal enregistré ou le diagnostic qui a le plus contribué à leur séjour à l'hôpital à la sortie de l'hôpital relève d'une catégorie de santé mentale ou de toxicomanie pendant une année définie.

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Maia Kvas est une analyste de recherche d'Expérience Nord

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