Coopération en soins de santé entre le Nord-Ouest ontarien et le Manitoba

le 17 decembre 2018 - Lorsqu’il est question d’accessibilité aux soins de santé, les habitants du Nord-Ouest n’ont pas nécessairement la vie facile. Il y a dans la région un hôpital capable d’offrir des interventions chirurgicales majeures : le Thunder Bay Regional Health Sciences Centre (TBRHSC). En ce qui concerne les personnes à l’extérieur de Thunder Bay, disons à Kenora, un voyage de six heures afin de se rendre à un hôpital majeur est plus qu’une bagatelle. Toronto est à un voyage d’avion en vue d’obtenir des interventions chirurgicales ou procédures médicales de pointe, même si cela n’est pas abordable pour tout le monde. Heureusement, la ville de Winnipeg et son hôpital régional se trouvent à seulement deux heures à l’ouest de Kenora, mais il y a un problème – c’est dans une autre province.

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Cheminement vers l’offre des soins de santé

Adoption des soins de santé, par les provinces (source : ministères provinciaux et territoriaux de la Santé)

healthcare-blog-graph-fr*Lorsque le Nunavut est né, en 1999, il s’est approprié le régime d’assurance-santé des T.N.-O. et en a assumé la responsabilité sur son territoire, avant de créer le régime des soins de santé du Nunavut, ce qui signifie que celui-ci n’a jamais été sans soins médicaux1.

En 1979, il a eu un examen fédéral de la prestation des soins de santé au Canada, ce qui a incité le Parlement à adopter en 1985 la Loi canadienne sur la santé (LCS). La Loi a créé une configuration par laquelle le gouvernement fédéral partagerait avec les provinces les coûts des soins, pourvu qu’elles respectent les conditions fédérales. Ce qui frappe le plus pour le Nord-Ouest ontarien, ce sont les dispositions relatives à la transférabilité, qui exigent qu’un régime de santé provinciale paie des services à l’extérieur des frontières provinciales. Chaque province à part le Québec fait aussi partie d’une série d’ententes de facturation bilatérale, qui assure que les patients d’autres provinces (PAP) n’ont pas à payer tout de suite. Toutefois les médecins des PAP peuvent opter pour ne pas se servir de la facturation réciproque et facturer plutôt un patient directement. Le patient doit alors demander un remboursement à son fournisseur provincial.

 Pour cette seule raison, en vertu de la LCS, il a toujours été possible pour les habitants du Nord-Ouest d’obtenir des services d’urgence au Manitoba. Mais que dire des services qui ne sont pas urgents? Afin qu’un médecin en Ontario recommande un patient à un hôpital de l’extérieur de la province pour cette sorte de services, le médecin doit conclure un arrangement et produire un formulaire destiné au gouvernement provincial. Chaque année, le Manitoba offre aux habitants du Nord-Ouest ontarien environ 20 000 services de soins de santé de toutes sortes2. Des soins au Manitoba sont offerts pour la plupart des services; toutefois, en raison de la bureaucratie et de problèmes de capacité du système, pour des soins tels que la chimiothérapie, les patients doivent être recommandés à des établissements à l’intérieur de la province, à Thunder Bay. Par conséquent, si envoyer un patient à Winnipeg aura une incidence négative sur la capacité du système de l’hôpital là-bas, ce patient devra plutôt être envoyé à Thunder Bay3. Ces problèmes peuvent parfois aboutir à ce que des gens soient recommandés à un hôpital qui est plus loin, ce qu’aucun patient n’aime entendre. Ainsi, il y a eu des demandes pour que les zones les plus à l’ouest du Nord-Ouest ontarien soient absorbées par le régime de soins de santé du Manitoba, afin d’éviter ce problème.

En dépit de ces obstacles, des progrès continus ont été faits en coopération entre l’Ontario et le Manitoba dans le domaine des soins de santé. Le 4 mai 2018, les deux provinces ont accepté un protocole d’entente (PE)4 de cinq ans, lequel assure que le Manitoba offre aux habitants du Nord-Ouest ontarien l’accès aux services de soins intensifs de courte durée, à Winnipeg, aux mêmes prix que ceux que paient les Manitobains5. En revanche, le gouvernement ontarien fournit au Manitoba du financement « complémentaire », afin de contrebalancer le coût des services qui ne sont pas couverts par les arrangements existants. Ce financement est offert par patient ou par « journée de service par patient ». Pour une visite de patient à la clinique externe, il en coûte 50 $ par service. Le Manitoba facture l’Ontario pour les services, et l’Ontario accepte de payer dans les 60 jours6. Toutefois, même si cette entente réduit le coût des soins de santé interprovinciaux ainsi que la bureaucratie, cela ne règle pas (et ne peut régler) les problèmes relatifs à la capacité du système. Cet obstacle ne peut être surmonté que par l’élargissement des services de soins de santé et l’embauchage d’un plus grand nombre de médecins et d’infirmières.

Une autre caractéristique remarquable du PE est le cadre manitobain pour des services nécessaires de transport sur les plans clinique et opérationnel, et ce, aux habitants du Nord-Ouest ontarien. Les coûts de ces services sont ensuite remboursés par l’Ontario7. Le Manitoba bénéficie également de cette entente : les médecins du Manitoba peuvent utiliser le système CritiCall de l’Ontario, aux fins du transport d’urgence de patients entre le Manitoba et l’Ontario, ce qui assure une transition efficiente aux patients ayant besoin de soins. Il peut être requis qu’un fournisseur de soins de santé au Manitoba obtienne une licence professionnelle additionnelle en Ontario, afin de pouvoir offrir les « services d’une équipe d’escorte clinique », mais l’Ontario accepte de payer au Manitoba les frais de licence8. Un autre aspect du PE est le groupe de travail interprovincial, qui a été conçu pour améliorer les procédures et protocoles. Le groupe de travail conjoint de l’Office régional de la santé de Winnipeg et du RLISS du Nord-Ouest comprend des représentants des autorités de la santé au Manitoba, du Réseau local d'intégration des services de santé – Nord-Ouest, puis des fournisseurs de soins de santé des deux provinces. Le groupe de travail Manitoba-Ontario comprend d’autres représentants des deux provinces9.

Les soins de santé interprovinciaux ont beaucoup progressé depuis la création de la Loi canadienne sur la santé, et des pas en avant sont continuellement franchis afin d’améliorer le traitement des patients. Des cliniciens ontariens et manitobains travaillent ensemble à améliorer des protocoles existants, en se fondant sur le principe du « patient en premier lieu » – à savoir que répondre aux besoins du patient est la principale préoccupation, au lieu des points de compétences provinciales ou du coût des soins. Quelles que soient les modalités de la collaboration et de l’intégration des soins entre les deux provinces, il est certain que les gens du Nord-Ouest en bénéficieront.

 

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Dawson Mihichuk a été une stagiaire d’été d’Expérience du Nord à l’IPN en 2018.


Notes de fin de texte :

  1. Bureau du ministère de la Santé du Nunavut. 2018, comm. pers.).
  2. Ministère de la Santé du Manitoba 2018, comm. pers.).
  3. RLISS du Nord-Ouest. 2018, comm. pers.).
  4. Sa Majesté la Reine du chef de l'Ontario et Sa Majesté la Reine du chef du Manitoba. Protocole d’entente Manitoba-Ontario. Kingston et Winnipeg : ministère de la Santé et des Soins de longue durée de l'Ontario et ministère de la Santé, des Aînés et de la Vie active, 2018.
  5. RLISS du Nord-Ouest. 2018, comm. pers.).
  6. Protocole d’entente Manitoba-Ontario, 2018.
  7. Ibid
  8. Ibid
  9. Ibid

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