Porter attention aux détails: la supression des données

18 juillet, 2016 - Récemment, l’Institut des politiques du Nord a diffusé une note d’information sur la façon dont la collecte des données est effectuée (ou non) dans le Nord de l’Ontario, et comment ceci peut influencer nos connaissances et notre perception d’importantes questions de politique publique dans la région. La première partie du rapport porte sur les risques de l’Enquête nationale auprès des ménages de 2011 (ENM), alors que la deuxième se penche sur une nouvelle idée, soit celle de créer un ensemble de comptes économiques régionaux pour le Nord ontarien.

Comme nous le savons, l’introduction de l’ENM volontaire par Statistique Canada pour remplacer le questionnaire détaillé obligatoire du recensement en 2011 a suscité plusieurs problèmes. Naturellement, plusieurs de ces problèmes découlent du fait que, comme il n’était pas obligatoire, moins de gens ont rempli le sondage. Et quand moins de gens participent à une enquête, Statistique Canada est plus susceptible de supprimer les données.

C’est exactement cela qui s’est produit dans plusieurs petites collectivités rurales du Nord de l’Ontario.

Parmi les 278 subdivisions de recensement (autrement dit, les collectivités), 107 (ou 38 %) d’entre elles ont été supprimées dans l’ENM, contrairement au Sud, où seulement 13 % des collectivités ont été supprimées. En d’autres mots, 74 % des collectivités supprimées de la province se trouvaient dans le Nord.

Ceci veut dire qu’il n’y avait aucune donnée sur le marché du travail, sur les niveaux d’éducation ou de revenu, sur l’immigration, ainsi que sur d’autres indicateurs.

Pire encore, le recensement/ENM était à peu près la seule source de données uniformes et fiables auxquelles ces petites collectivités avaient accès. L’ENM a créé une lacune statistique dans le Nord, et il n’est pas surprenant que beaucoup de gens aient ardemment appuyé le rétablissement du questionnaire détaillé du recensement.

Alors que le rétablissement du questionnaire détaillé obligatoire du recensement aidera à résoudre certains problèmes, une autre lacune statistique persiste dans le Nord de l’Ontario, soit celle d’un ensemble de comptes économiques régionaux. À l’heure actuelle, Statistique Canada publie des comptes économiques pour chaque province et territoire; l’idée serait de faire pareil pour le Nord de l’Ontario. Oui, une région à l’intérieure d’une province.

Notre région a besoin de son propre ensemble de comptes économiques, car à bien des égards, le Nord de l’Ontario est fondamentalement différent du reste de la province. La structure industrielle et professionnelle du Nord est très différente. La composition démographique est très différente. La gouvernance est différente. On connaît bien ces différentes, et bien d’autres encore.

La création d’un ensemble de comptes économiques régionaux pour le Nord de l’Ontario ferait officiellement reconnaître ces différences dans notre déclaration publique des statistiques, ce qui mènerait à des politiques plus éclairées et plus adaptées à la région.

Un ensemble de comptes économiques régionaux pourrait inclure des indicateurs tels que : des dépenses et des revenus provinciaux et fédéraux dans le Nord de l’Ontario; des exportations et des importations régionales; un produit intérieur brut (PIB) régional; ainsi que d’autres indicateurs macro-économiques.

Nous avons actuellement des moyens approximatifs pour estimer certains de ces indicateurs. Au fait, en estimant le PIB régional tel que présenté dans sa note d’information, l’Institut des politiques du Nord a trouvé que la trajectoire de la croissance économique de cette région était fondamentalement différente de celle de l’Ontario. Depuis une quinzaine d’années, le Nord de la province a connu six ans de croissance négative du PIB par rapport à l’année précédente. L’Ontario a eu une période de deux ans de repli lors de la récession de 2008-2009. Ceci est surprenant, car le PIB est un indicateur économique global que nous consultons pour comprendre comment se porte notre économie et pour mettre en œuvre des politiques publiques éclairées.

En ne reconnaissant pas officiellement ces différences régionales dans notre déclaration statistique publique, nous supposons que le Nord est sur la même trajectoire que le reste de la province. Et ceci mène à l’une des plus grandes plaintes de la part des résidents du Nord, à savoir que les politiques universelles ne répondent pas aux besoins du Nord de l’Ontario.

Prenons, par exemple, la Déclaration de principes provinciale (DPP) — qui comprend les politiques à l’échelle provinciale sur l’aménagement du territoire en Ontario. Plusieurs résidents du Nord soutiennent que la DPP reflète en grande partie les préoccupations du Sud de la province; par conséquent, les politiques de celle-ci peuvent limiter la croissance tant espérée de notre région. La politique universelle suppose que le Nord a les mêmes défis et les mêmes besoins que le Sud, ratant inévitablement la cible.

D’autre part, le gouvernement fédéral a récemment annoncé une nouvelle approche intéressante pour verser les prestations d’assurance-emploi prolongées. En bref, le gouvernement utilise les données de l’Enquête sur la population active régionale afin de déterminer quelles régions provinciales ont des taux constamment élevés de chômage, versant ensuite des prestations d’AE prolongées en conséquence. Cette approche est quelque peu critiquée, mais dans l’ensemble elle représente un pas dans la bonne direction, car elle reconnaît la nécessité pour différentes prescriptions de la politique régionale. Et ceci est seulement possible en raison d’une déclaration statistique infraprovinciale formelle sur le marché du travail. Les données régionales sur mesure mènent à des prises de décision régionales sur mesure.

Un ensemble de comptes économiques régionaux qui contrôle les indicateurs macro-économiques fondamentaux pour le Nord de l’Ontario favorisera notre capacité à comprendre et à percevoir les possibilités et les défis régionaux, permettant ainsi aux décideurs de mettre en œuvre des décisions éclairées en matière de politiques nord-ontariennes. Ça vaut la peine d’essayer — et sans doute que le Nord de l’Ontario n’hésiterait pas à jouer le rôle de cobaye régional.

 

James Cuddy est l’économiste interne de l’Institut des politiques du Nord. Première publication dans Northern Ontario Business, en juillet 2016.

 

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