L'éducation n'est pas de la revendication

16 novembre, 2015 - Il y a quelques années, j'ai eu une rencontre fascinante avec le ministre des Finances du Nouveau-Brunswick. Cette rencontre m'est revenue à l'esprit au cours des deux dernières années puisque je voyage dans le Nord ontarien et explique aux gens la différence qui existe un groupe de réflexion et un groupe de revendication. Ou, du moins, la différence entre l'Institut des politiques du Nord et le service de recherche pour la « revendication des droits du Nord ».

Le nom de ce ministre était Blaine Higgs. Celui-ci avait connu la réussite avant son entrée en politique et avait une réputation bien méritée pour sa franchise. Son personnel m'avait demandé de le rencontrer afin d'expliquer les mérites relatifs de la consommation par opposition à ceux de l'impôt sur le revenu. Le Nouveau-Brunswick luttait alors (et encore, en fait) pour trouver une gamme fiscale permettant d'aider les programmes nécessaires mais encourageant aussi les investissements privés et la croissance économique.

Higgs a débuté la rencontre avec son style classique. Il m'a demandé : « Alors, que voulez-vous? » À cela j'ai répondu « Rien ». Le Ministre était perplexe.

TOUS ceux qui rencontrent le Ministre veulent quelque chose; tous savent cela n'est-ce pas? Eh bien, non. Comme je l'ai expliqué à Higgs, mon travail est d'éduquer les personnes en matière de politique : les ministres, les politiciens de l'Opposition, les bureaucrates, les partisans, les donateurs, le grand public. Pour quiconque veut apprendre, mon équipe, moi, ainsi que des personnes comme nous dans le pays et le monde sont là pour enseigner. Si vous ne voulez pas apprendre ou utiliser ce que vous avez appris, ou si vous pensez que vous n'avez rien à apprendre, ou que nous n'avons rien à vous enseigner, c'est votre affaire.

J'étais là pour tenter de répondre à ses questions ou l'aider à le faire. S'il n'en avait pas, alors je pouvais partir. Cela, en gros, est la différence qui existe entre l'éducation (ce que fait l'Institut des politiques du Nord) et la revendication (ce que font votre Chambre de commerce locale, le syndicat local et la société « de la protection X »).

Voici des règles de base pratiques pour différencier les éducateurs et les revendicateurs. Elles ne sont pas parfaites, et les loups déguisés en brebis sont nombreux, et vice versa. Ce sont toutefois un point de départ.

Premièrement, les revendicateurs demandent à vous rencontrer. Les éducateurs ne le font pas. Vous devez les inviter à venir vous parler. Il faut que vous ayez l'intention d'écouter ce qu'ils veulent dire. Vous devez avoir des questions auxquelles vous espérez qu'ils puissent vous aider à répondre.

Deuxièmement, la revendication porte singulièrement sur ce qui est le meilleur pour les revendicateurs (ou leurs clients), et ce n'est qu'ensuite qu'ils s'intéressent à la façon de vous aider ou d'autres. Si en aider d'autres aide les revendicateurs à obtenir ce qu'eux ou leurs clients veulent, cela facilite leur travail, mais ce n'est pas une condition préalable. Les éducateurs tentent de voir les conséquences non intentionnelles de diverses interventions politiques et en exposent complètement le pour et le contre.

Troisièmement, les revendicateurs vous disent ce que votre idée politique fera pour eux (ou leurs clients). Les éducateurs vous disent si votre idée politique atteindra l'objectif que vous visez et à quel prix.

Ces trois règles fonctionnent raisonnablement bien, en particulier au Canada lorsqu'il s'agit de différencier entre éducateurs et revendicateurs. Beaucoup de groupes de réflexion franchissent occasionnellement la ligne, certains plus fréquemment que d'autres. De nombreux universitaires font de même, certains plus souvent qu'ils veulent le croire. Il n'est alors pas surprenant que Higgs et beaucoup de personnes que j'ai rencontrées dans les collectivités du Nord soient sceptiques.

Pour cette raison, l'Institut des politiques du Nord a ajouté une couche protectrice, assurant ainsi que nous continuions d'être de ceux qui répondent aux questions et non de ceux qui revendiquent des réponses prédéterminées. Unique parmi les groupes de réflexion canadiens (que je sache du moins), le programme de recherche de l'Institut des politiques du Nord est élaboré à l'aide de nos échanges avec vous, nos amis et voisins. Les quelque 780 000 d'entre vous.

Chaque fois que vous nous envoyez un courriel, une remarque relative à un blogue, participez à une activité et posez une question, nous consignons cela. Nous assurons le suivi d'un échantillonnage de médias locaux, régionaux, nationaux et internationaux; de médias sociaux, de médias qui s'adressent au grand public ainsi que de publications d'industries et de spécialités. Chaque trois mois, nous résumons ce que nous avons appris et lu, puis présentons les dix principales questions que posent les gens du Nord. Nous nous efforçons ensuite de faire en sorte que les questions que nous posons à nos chercheurs correspondent à celles pour lesquelles vous voulez une réponse.

Comprenez-moi bien. Il y a aussi des choses que nous voulons. Nous sommes des parents, des élèves, des employés, des conducteurs, des résidants, des contribuables, des chasseurs et bien d'autres choses également. Ce qui se passe dans le Nord ontarien nous importe, et nous avons tous nos points de vue quant à ce qui devrait se produire. Nous équilibrons toutefois nos questions et les vôtres, tout comme nous équilibrons vos questions et celles de la dame au bout de la rue qui est cinglée selon vous. Voilà qui, pour des gens comme Blaine Higgs, pourra sembler stupide, mais nous croyons que cela fonctionne.

Charles Cirtwill est président et chef de la direction de l'Institut des politiques du Nord, groupe indépendant de réflexion sociale et économique et dont le siège social est dans le Nord de l'Ontario.

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