Examen plus approfondi du RRPO – Deuxième partie

15 septembre, 2014 - Un sujet clé récent pour les Ontariens est la réforme du régime de pensions. Bien que les réalités imminentes de la retraite semblent inquiétantes, le gouvernement provincial prétend avoir une solution. Présenté comme un pas dans la bonne direction, le RRPO promet de fournir un régime de pensions complémentaire fiable et durable pour la province. Même si le forfait pour l’assistance à la retraite peut potentiellement faire du bien, les théoriciens de l’économie, soutenus par une vaste documentation signalent des lacunes de conception importantes du RRPO; elles doivent être comblées avant la mise en œuvre si quelqu’un doit vraiment en bénéficier. À la lumière de ces évaluations, il est important de déterminer qui le RRPO sert en réalité, en quoi il est insatisfaisant, puis nuisible pour ceux qu’il devrait aider?

En examinant davantage cette stratégie de retraite complémentaire, il est raisonnable de commencer par relever les aspects positifs du RRPO : qui en profite? La réponse est courte et précise – de jeunes salariés au revenu moyen, de 20 à 30 ans, qui n’ont pas de régime de retraite au travail. Actuellement, le RPC couvre  les revenus jusqu’à 52 500 $. Le RRPO comporterait un plus large éventail – jusqu’à 90 000 $. Cela est perçu comme un aspect positif, et une étude récente de Statistique Canada suggère que ceux qui se trouvent au milieu de la fourchette de revenu ont le pourcentage le plus élevé de personnes pour qui le revenu de retraite n’est pas à la hauteur de ce qu’elles gagnaient au travail. La raison pour laquelle cette fourchette est si spécifique tient au fait que le régime ne paie pas les premières prestations complètes avant 2059; alors, la génération du baby-boom, les plus jeunes sont nés en 1965, aura bien dépassé l’âge du départ à la retraite. Avant, quiconque se trouve dans ce groupe de travailleurs sans régime de retraite obtiendra une prestation au prorata.  Selon les représentants du ministère des Finances, les travailleurs plus âgés auront des montants inférieurs reflétant ce qu’ils auront payé dans le régime, ce qui signifie que la plus haute prestation du système irait aux Ontariens ayant des décennies de travail devant eux.

Malheureusement, la liste des blessures du RRPO est plus longue que cela. La première cohorte directement touchée est le secteur de l’emploi, principalement les employeurs et les employés des petites et moyennes entreprises n’ayant pas de régime de pensions obligatoire au travail. Selon la Fédération canadienne de l’entreprise indépendante (FCEI), le régime de pension de retraite pourrait faire monter le taux de chômage de l’Ontario jusqu’à 6,7 % d’ici 2020 – par rapport à une projection du statu quo, à 6,2 % sans le RRPO. Même si les emplois seraient recouvrés avec le temps, ils reviendraient à des salaires inférieurs. La modélisation du passé de la FCEI pour les répercussions du RRPO a révélé que la part des employées pour les charges sociales aurait relativement peu d’effets nets sur la performance de l’économie. Au fond, les employés conservent leur propre argent – l’utilisation qu’ils en font, passant simplement d’une période à l’autre. C’est pour la part des employeurs aux charges sociales qu’il y a le plus de dommage économique. Contrairement à ce qui se passe pour les employés, l’argent des employeurs ne revient pas plus tard – c’est un transfert. Les employeurs paient le personnel en fonction de la valeur de sa production. Que les paiements soient pour les salaires existants ou les pensions futures, il n’y a pas de différence pour les employeurs parce que l’argent est versé de toute façon. Face au coût obligatoire supplémentaire des charges sociales, sans que ce soit accompagné d’une valeur supplémentaire de production, les entreprises doivent procéder à des rajustements. Les résultats à court terme se trouvent sur le marché du travail, et les effets à long terme, dans les niveaux salariaux.

Les prochains perdants dans le projet du RRPO sont les gens à faible revenu. À ce stade, le gouvernement provincial n’a pas décidé d’un montant minimal pour ne pas participer au régime obligatoire, mais le minimum du RPC (3 500 $ par année) a été mentionné. Cela signifierait que le RRPO tel qu’il est actuellement conçu est non seulement médiocre, il est aussi potentiellement nuisible. Cela tient au fait qu’il existe des options politiques supérieures qui offrent de la protection pour cette catégorie salariale lors de la retraite. Avec les prestations fédérales existantes telles que la Sécurité de la vieillesse et le Supplément de revenu garanti, les travailleurs à faible revenu tendent à se bien porter à la retraite tout comme lorsqu’ils travaillaient. Kevin Milligan, professeur de la Vancouver School of Economics de l’Université de la C.-B. et rédacteur pour Maclean’s a l’impression que, pour ceux qui se démènent sur le marché du travail avec de faibles revenus, le RRPO leur prendrait de l’argent pendant qu’ils se démènent et ne leur remettrait pas avant la retraite, alors qu’ils se démènent moins. Milligan déclare de plus qu’il serait préférable que personne n’ait à se démener, mais forcer les gens à économiser davantage aux fins du RRPO quand ils ont du mal à joindre les deux bouts n’est pas une excellente solution pour le problème d’une vie de faibles revenus. Il semble que dans le cadre du RRPO, les choses empirent même pour les gens de cette catégorie : souvent ces personnes à faible revenu reçoivent à la retraite le Supplément de revenu garanti. Ces prestations fédérales reçues à la retraite réduisent d’environ 50 cents par dollar ces prestations gouvernementales. Les résultats de cela étant que les personnes à plus faible revenu ne recevraient que la moitié de leurs contributions au RRPO à la retraite, en raison de récupérations de pension. En fin de compte, ces gens paient toute la pension et ne reçoivent en retour que la moitié de celle-ci.

Comme nous en avons brièvement traité plus haut, il y a deux catégories de la population active qui sont complètement écartées du projet du régime de prestation de l’Ontario : les riches et ceux qui sont déjà inscrits à un régime de pension au travail. Du point de ce ces deux groupes, cette première ébauche du RRPO ne sert à rien. Après une exploration complète de ce système de retraite, tel qu’il est présenté, il est évident que la portée du projet du RRPO est limitée, laisse à désirer sur des points cruciaux, peut même potentiellement nuire à aux plus vulnérables de la population de l’Ontario. Afin de contrer certains de ces effets négatifs, il faut que le RRPO soit restructuré et que le seuil de couverture des revenus soit reconsidéré. Il reste à s’entendre publiquement sur un enjeu, à savoir s’il faut que le régime de pensions complémentaire soit obligatoire ou facultatif, et le gouvernement provincial n’a jusqu’à maintenant pas abordé la question de la transférabilité. Au lieu de faire un pas coûteux dans la bonne direction, il serait préférable pour les Ontariens de pouvoir faire un pas calculé et confiant vers la retraite.

Par Cheryl Reid

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