Plus que des besoins impérieux : le Nord ontarien a-t-il besoin de sa propre stratégie de logement?

Le 20 août 2018 - Des habitations du Nord ontarien ont besoin de réparations majeures. Près d’un logement sur dix du Nord ontarien a une structure, du filage et/ou de la plomberie inadéquats, un taux de beaucoup supérieur à celui du reste de la province. De plus, l’offre du côté du logement est mince, et il est à prévoir que la situation sera pire si le Nord attire les 6 000 nouveaux arrivants dont il a besoin.

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Bref, le Nord ontarien a clairement besoin de logements, et ils sont différents de ceux du reste de la province.

Pourtant, il y a très peu d’éléments en place pour s’attaquer à ce point. Par exemple, même si la stratégie nationale sur le logement a un volet nordique, l’argent saute par-dessus le Nord ontarien et est plutôt concentré sur les Territoires. La stratégie de l’Ontario ne mentionne le Nord qu’une fois, et c’est simplement dans une note administrative de bas de page.

Une stratégie axée sur les besoins uniques du Nord aiderait peut-être à abaisser le taux des logements inadéquats. Mais de quoi aurait-elle l’air? Ci-dessous se trouvent des éléments qu’elle pourrait contenir, bien qu’il ne s’agisse que de points de départ qui doivent être analysés plus profondément avant d’être mis en œuvre.

En premier lieu, elle pourrait aller au-delà des besoins impérieux de logement. Par les besoins impérieux, il y a évaluation du nombre des logements inadéquats, insalubres et/ou inabordables; cela a servi à allouer des fonds dans le cadre du programme d’investissement dans le logement abordable (élargissement 2014) [traduction]de l’Ontario. Le problème ici est qu’il exclut un certain nombre d’habitations, surtout celles des réserves des Premières Nations.

C’est un facteur vraiment problématique. Le Nord ontarien a plus de 33 000 logements inadéquats [1]; environ 6 500 ne sont pas évalués pour les besoins impérieux, dont 5 300 sur des réserves [2]. De plus, 17 500 autres ne se qualifient pas parce que les ménages pourraient être en mesure de payer le loyer médian d’un logement de rechange acceptable dans leurs collectivités. Cela signifie que 73 % des logements inadéquats du Nord n’étaient n’ont pas comptés lorsque le financement a été accordé. Qu’il s’agisse de besoins impérieux ou non, ces 24 000 habitations ont encore besoin de réparations majeures, ce qu'une stratégie du logement pourrait aider à résoudre.

Il n’y a pas d’endroit dans le Nord où cela puisse plus servir que dans les réserves des Premières Nations. La figure 1 montre combien plus élevés sont les taux des logements inadéquats dans ces collectivités.

noga-blog_reserve-housing-map-frCalculs de l’auteur, fondés sur « Expanded table: Ranking of census subdivisions by percent of households in dwellings needing major repairs »  [en anglais seulement]

 

Maintenant, il y a des outils provinciaux et fédéraux pour le logement autochtone, ainsi que des fournisseurs autochtones de services de logement, et tout cela fait beaucoup de bien. Malheureusement, les décisions prises à Ottawa pour les Premières Nations peuvent laisser à l’extérieur pour plus d’un million de dollars de matériaux de construction d’habitations, en attente de quelqu’un pour l’assemblage, comme c’est arrivé à Nibinamik, en 2016. Cela, combiné à l’exclusion de l’évaluation des besoins impérieux, démontre clairement que les Premières Nations ont besoin de leurs propres solutions de logement.

Une stratégie de logement pour le Nord ontarien pourrait déléguer à des groupes autochtones l’entretien et le contrôle des habitations. De plus, des partenariats nouveaux et améliorés entre tous les partenaires de traités aideraient à atteindre les objectifs de la Déclaration des Nations Unies sur les droits des peuples autochtones (DNUDPA) et, plus directement, à améliorer les conditions de vie des peuples autochtones du Nord.

Toutefois, comme le montre la figure 1, ce n’est qu’une solution partielle.

En effet, 84 % des habitations inadéquates du Nord ne sont pas sur une réserve ou dans un peuplement [3]. Par conséquent, chaque division de recensement du Nord serait au-dessus de la moyenne provinciale, quel que soit l’état des habitations sur les réserves. Au total, beaucoup d’habitations du Nord ont besoin de travaux, et le Nord pourrait certainement utiliser des gens pour les exécuter ces travaux.

Conformément à ce qui a été mentionné dans un blogue antérieur de l’IPN, le Nord a besoin de beaucoup plus de gens de métier spécialisés, surtout avec tant de travailleurs actuels qui approchent de la retraite. Une stratégie du logement pourrait aider pour cela. Même si, alors, ne serait peut-être pas changée la façon de voir les métiers ou de mettre à jour le système d’apprentissage, afin qu’il y ait davantage d’opportunités (les deux sont nécessaires), cela permettrait toutefois de recruter un plus grand nombre de jeunes, d’attirer des immigrants qualifiés, et d’être l’entremetteur pour le marché du travail mal aligné. Le Nord ontarien a besoin d’apprentis, et ceux-ci ont besoin d’expérience, ce qu’ils peuvent avoir en exécutant une bonne partie des réparations nécessaires dans les habitations du Nord. La stratégie pourrait viser les trois d’un coup par des incitatifs tels que le financement direct, des subventions de formation, des crédits d’impôt et des programmes de travail. En outre, il y aurait des retombées.

Pour des preuves, ne cherchez pas plus loin que les Premières Nations de Rainy River, de Wunnumin Lake et de Nibinamik. Chacune a remporté des prix en 2017, en raison de son programme de logement communautaire. Chacune dépendait de la capacité locale – et en a favorisé le développement –, en vue d’offrir des habitations adéquates à ceux qui en avaient besoin. Qui plus est, elles ont misé sur le financement gouvernemental et leurs besoins de logement spécifiques, afin d’enseigner des compétences précieuses pour la planification et la construction, de grouper la collectivité et même de combattre la toxicomanie. De telles leçons méritent d’être prises en considération dans d’autres collectivités du Nord ontarien.

Au total, le Nord ontarien a besoin d’un plus grand nombre d’habitations, de gens de métier et de décisions locales. Une stratégie du logement, axée sur les besoins distincts du Nord atteint tout cela. Elle pourrait aussi s’attaquer au fléau des logements inadéquats, qui se trouvent dans presque toutes les collectivités du Nord. Beaucoup d’habitants du Nord peuvent en tirer avantage et pas seulement ceux qui ont des besoins impérieux de logement.

 

 Anthony Noga est analyste de recherche à l’Institut des politiques du Nord.


[1] Calculs de l’auteur, fondés sur les Besoins impérieux en matière de logement, par division de recensement – téléchargement depuis http://www12.statcan.gc.ca/census-recensement/2016/dp-pd/chn-biml/index-fra.cfm

[2] Calculs de l’auteur, fondés sur « Expanded table: Ranking of census subdivisions by percent of households in dwellings needing major repairs » http://www.ruralontarioinstitute.ca/knowledge-centre/focus-on-rural-ontario [en anglais seulement]

[3] Calculs de l’auteur, fondés sur « Expanded table: Ranking of census subdivisions by percent of households in dwellings needing major repairs » [en anglais seulement] http://www.ruralontarioinstitute.ca/knowledge-centre/focus-on-rural-ontario

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